Enfin! J’ai réussi à voir l’expo « Garry Winogrand » au Jeu de Paume, place de la Concorde à Paris. Il faut dire que cette exposition n’a pas désemplie du 14/10/2014 au 08/02/2015. Il faut croire que la publicité format géant dans les rames de métro et les stations RER a donné envie! Un clin d’oeil justement à la Street Photography?
GARRY WINOGRAND au Jeu de Paume
Véritable explorateur du quotidien, Garry Winogrand (1928-1984) fut le photographe des rues américaines de l’après-guerre. Ses photographies sont pleine de réalisme, de poésie et d’humour. On y trouve mélangés : des hommes d’affaires, des sportifs renommés, des femmes, des manifestants, des ouvriers, des animaux, des fêtards… Autant de spectacles pour nous qui représentent de façon emblématique ce qu’est la ville!
Un New-Yorkais spectateur de l’Amérique
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Du bronx à Manhattan
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C’est l’Amérique que j’étudie
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Splendeur et Déclin
Gary Winogrand : un style
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Mon cours Yellow Korner
Un New-Yorkais spectateur de l’Amérique
Garry Winogrand a silloné les Etats-Unis pendant les décennies d’après-guerre. Son oeuvre s’étend de Manhattan à Santa Monica, du grand évènement au détail de la rue. Figurant parmi les plus grands photographes de la ville, il a mis son art au service de la photo du quotidien, convaincu que l’ordinaire, pourvu qu’on se donne la peine de le photographier rèvèle tout un univers. D’abord photographe lisse au service des magazines, il devient ensuite plus moqueur.
Cette exposition est la plus vaste à ce jour et se décline en trois parties : « Du Bronx à Manhattan » de 1950 à 1971, « C’est l’Amérique que j’étudie » même période, « Splendeur et déclin » fin de son oeuvre.
Du Bronx à Manhattan
New-York, ville natale de Winogrand est aussi son principal lieu de travail jusqu’en 1971. Bien qu’originaire du Bronx, il a réalisé la grande majorité de ses photos à Manhattan entre le grand magasin Macy’s et Central Park. Elles couvrent les années 50, puis l’optimisme et la prospérité des années 60.
A ses débuts, New York est pour Winogrand une grande scène populaire où les drames se succèdent sans interruption, scénographiés ou improvisés, comiques ou tragiques. Winogrand s’est interessé toute sa vie à la politique, mais là aussi en tant que spectacle. Des années 50 à 76, il aura photographié tous les présidents et vice-présidents de chaque gouvernement.
« Parfois, c’est comme si […] le monde entier était une scène pour laquelle j’ai acheté un billet. Un grand spectacle qui m’est destiné, comme si rien ne se produirait si je n’étais pas sur place avec mon appareil. »
C’est l’Amérique que j’étudie
C’est au début des années 50, que Winogrand commence à voyager hors de New York. Très vite il s’intéresse à la nouvelle culture des banlieues, et il visitera plusieurs fois des villes en expansion telles que : Houston, Dallas et Los Angeles. Il a été séduit par les cow-boys et par l’extravagance d’Hollywood.
Mais il évoque son désarroi en découvrant que les idéaux des Américains sont bâtis sur des fantasmes et des illusions. Sous son regard tout se confond : beauté et chaos, ridicule et profondément sérieux.
Les références explicites à la guerre du Vietnam sont rares. Néanmoins, il s’est attaché à photographier dans les aéroports les soldats qui rentraient dans leur foyer. Il était convaincu qu’une photographie ne pouvait pas changer le monde, ni même l’expliquer.
Splendeur et déclin
Tandis que s’achèvent les années 60, Winogrand quitte New York d’abord pour Chicago puis Los Angeles. Il veut approfondir ses recherches dans l’Ouest. Il continue de photographier des parades touristiques, des rodéos, des matchs de foot et des aéroports. Mais la tonalité de son oeuvre a changé : la jubilation n’y est plus.
En 1984, il apprend qu’il est atteint d’un cancer généralisé et que ses jours sont comptés. Il laissera près de 6600 rouleaux de pellicules qu’il n’a jamais examiné et beaucoup plus dans lesquelles seulement quelques images ont été sélectionnées à la hâte. Bref : une expo super! On ne peut pas s’empêcher de sourire de drôlerie ou de tristesse devant ce regard porté sur une amérique chaotique et extravagante!
Garry Winogrand : un style
Maintenant je vous emmène dans le cours que j’ai suivi à Yellow Korner sur Garry Winogrand! Il s’agit de « Masterclass » dans les magasins eux-mêmes. Durée : 1h! C’était la première fois que j’assistais à un « cours » de l’histoire de la photographie. Après un petit dérapage niveau micro et réglage de la sono dans le magasin YellowKorner de Pompidou, Guillaule Le Gall, maître de conférences en hisoire de l’art nous a introduit la photographie américaine documentaire de Winogrand.
Ma première impression? J’ai ri! Mais alors j’ai ri! Intérieurement bien-sûr… j’étais au premier rang!
Pourquoi j’ai ri? Et bien parce que pour mon esprit un peu trop scientifique, la photographie, c’est de l’art, des émotions et c’est assez bizarre de se l’entendre décortiqué comme ça… Soit! Passé le sourire de cette « dissection », voyons ce que j’ai appris…
Les photos de Winogrand se caractérisent par « l’étrangeté » qui s’y dégage. Souvent, ses photos sont décadrés, ou bien de travers, ce qui provoque chez nous une angoisse, une inquiétude. Voulait-il par là, dénoncer une désagrégation nationale? Il étudie les relations sociales, de manière brutale. Il utilise le « close up« , ce cadrage très serré sur le sujet, donnant l’impression que l’on est avec lui. Le premier plan est souvent flou! Les images de Winogrand sont à prendre au premier degré. Loin de lui, l’idée de faire passer un message recherché. Contrairement à d’autres photographes comme Cartier-Bresson, pas d’instants décisifs ou d’élaboration de l’image parfaite. Elle est brut, instantanée. D’ailleurs c’est une des choses qui m’a frappée dans l’expo : tant de photos floues et décadrées!!!
Même si Winogrand ne cherche pas à dénoncer à proprement parler, il y arrive car ses photos provoquent en nous l’étonnement, la surprise et surtout l’humour noir. On ne peut rester indifférent face à la cruauté des relations hommes-animaux, l’aliénation de la vie moderne dans les grands rassemblements, etc.
Nous avons aussi compris quelles étaient les références de Garry Winogrand dans son oeuvre. Walker Evans aurait inventé le style documentaire. La bible de l’époque (1938) est alors « American Photographs ». On l’appelle la Straight photography, direct, sans décor, brutale. La photo ci-dessous dans le métro date de 1938.
Le livre « Labor Anonymous » de 1946 l’aurait également beaucoup inspiré. Mais parmi ses inspirations, on compte aussi Dan Weiner ou notre français H. C-B.
Robert Franck en 1958 répond à W. Evans avec son oeuvre « les américains » décrivant un pays mélancolique.
Enfin, on pourra aussi citer : Lee Frielandler décrivant une amérique un peu bizarre…
Et puis dans le genre Freaky, on peut bien-sûr citer Diane Arbus! Parce qu’elle, elle maitrise carrément les photos de « gueules ». Taper juste « Diane Arbus »+Freak sur google : y’a du monstre en veux-tu en voilà quand même…
En conclusion : je suis très contente de cette exposition ET de ce cours. Merci beaucoup Fannie! Je vous conseille ces cours. Ils vous apportent un éclairage différent, un peu comme si vous vous faisiez une expo avec un pote tiens! On lance un débat, on est pas toujours d’accord mais dans tous les cas, on en sort inspiré et on apprend beaucoup de choses. Une belle expérience. A refaire.
Allez un petit freaky,mais mignons! Pour vous laisser des images rigolotes en tête ahahah…
A reblogué ceci sur Eurochild Thoughtset a ajouté:
Très bel article que les amoureux de la photo apprécieront !