La trinité de la photo: #3 la sensibilité de votre pellicule

Vous avez acheté un super appareil photo: argentique ou numérique, persuadé que maintenant, vous allez devenir le roi de la photo? Malheureusement, lire le manuel de 472 pages vous décourage un peu, sans parler du fait que vous n’arrivez même pas à vous déplacer dans le « menu » de l’appareil avec le joystick soit disant ergonomique. Hum hum hum… Bientôt, quand tout le monde saura que vous ne faites que des clichés en tout automatique malgré le prix de votre appareil, vous allez passer pour une quiche! ahahah! Bien fait! Allez… je plaisante, et je vous propose un tuto de rattrapage.

La base de la base, résumé en la trinité de la photo :

ISO/VITESSE/OUVERTURE.

Pour prendre une jolie photo, il faut d’abord que la quantité de lumière qui ait exposé le film (ou le capteur digital) soit ni trop importante (où alors la photo sera trop éclairée, on dit : SUR-exposée) ni trop faible (la photo sera trop sombre, on dit SOUS-exposée). Cette quantité de lumière parfaite est un equilibre entre la sensibilité ISO, la vitesse et l’ouverture. En plus de cela, en jouant sur un paramètre (et en compensant sur les autres) il est possible de modifier : la netteté de votre image et le grain. C’est ce que nous allons voir ici dans ces 3 tutos! Après avoir vu la vitesse d’obturation, et l’ouverture, voyons maintenant la sensibilité du film notée iso. A tous les photographes numériques, ne croyez pas que cet article ne vous concerne pas, c’est tout le contraire!

#3 – La sensibilité de votre pellicule notée en ISO

Nous l’avons déjà vu dans l’article sur comment choisir sa pellicule argentique, la sensibilité du film à la lumière est très importante. En fait, elle dépend d’abord de votre environnement. Pour choisir sa pellicule, il faut d’abord regarder sa sensibilité (dont l’unité est l’iso). Dans un appareil photo numérique, il s’agit du réglage de la sensibilité du capteur. Comment savoir quelle sensibilité choisir? En théorie, plus le chiffre devant l’iso est faible, par exemple : 50 iso, plus votre pellicule est peu sensible à la lumière. Vous devrez donc l’utiliser dans un environnement très lumineux : grand soleil, montagne enneigée. En contre partie, votre pellicule aura ce que l’on appelle un « grain » plus fin. Et oui, votre pellicule a un grain, peut-être comme votre collègue de bureau. C’est à dire que même en agrandissant votre photo, les détails de l’image seront respectés très fidèlement. Les contrastes et la finesse du grain rendront votre photo très réaliste. Dans des conditions moins lumineuses : par exemple un ciel très nuageux ou bien des photos en intérieur, préférez une pellicule 400 iso. Enfin, si vous voulez prendre des clichés la nuit ou la lumière d’une bougie obtez carrément pour une 1600 ou 3200 iso. Dans ce cas, votre pellicule ou votre capteur sera plus sensible. Par contre si vous utilisez une pellicule très sensible dans des conditions plutôt lumineuses, vous obtiendrez une photo plutôt « granuleuse », avec un gros grain, en numérique on parle de bruit. Avec votre appareil photo numérique, vous pouvez également régler cette sensibilité ISO (image ci-dessous).

sensibilité iso

Ça c’est pour la théorie! Mais en fait, cette sensibilité est en équilibre avec les deux autres paramètres dont nous avons déjà parlé : vitesse d’obturation ET ouverture!

Iso élevé : faible lumière. Iso faible : beaucoup de lumière.

Autrement dit, tout est possible, puisque nous l’avons vu, nous pouvons fixer un paramètre et compenser sur les autres. Alors pourquoi pas deux et compenser sur l’iso? Ou bien fixer l’iso pour imposer son grain, et compenser sur l’ouverture et la vitesse? Certaines personnes trouvent le grain esthétique. Il existe même des pellicules de faible sensibilité mais avec un grain présent (photos ci-dessous : pellicule Rollei Retro 100 périmé). Chacun ses goûts! 02620013

La sensibilité et le triangle de la photo

Iso, ouverture et vitesse sont liés. Tout est équilibré en fonction de la quantité de lumière du sujet à photographier. Pour vous montrer les différences, j’ai pris une photo d’une pellicule avec un faible éclairage avec différentes valeurs d’iso, et j’ai laissé mon appareil photo numérique choisir vitesse et ouverture. Comme vous pouvez le voir sur la photo suivante, les trois paramètres sont en équilibre. Quand l’un diminue, l’autre augmente etc. Les photos sont quasi similaires (sauf celle avec f/22, car la profondeur de champ est plus grande).

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Avec des sensibilités différentes, et avec une ouverture semblable, on observe alors que le temps de pose varie : de 1/1.3 à 1/40 (photo ci-dessous). On remarque aussi sur l’image ci-dessous, que la qualité de l’image est nettement moins bonne à sensibilité élevée (ici, iso 24600). C’est le fameux bruit en photo numérique (appelé grain en argentique).

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Choisir la sensibilité et faire varier vitesse et ouverture

Lorsque l’on fait de la photographie argentique, la sensibilité est imposée par la pellicule. Une fois la pellicule dans l’appareil, impossible de changer la sensibilité du film en cours de route. Dans la même situation de lumière, avec une pellicule à faible sensibilité, vous serez obligé de compenser en ouvrant grand votre diaphragme, et donc vous perdrez en profondeur de champ. Avec un film très sensible, vous serez obligé d’utiliser un diaphragme plus petit et donc vous obtiendrez une grande profondeur de champ.  Photo ci-dessous prise avec une pellicule lomo 200 iso : malgré la lumière bien présente, et une focale 50 mm, on observe une profondeur de champ limitée. 000039 (5)

En argentique, si votre appareil n’est pas trop ancien, soit il détecte la sensibilité de votre pellicule (voir bonus tout à la fin), soit vous lui indiquez sur une bague iso, la sensibilité du film. Ensuite la cellule de l’appareil (appelée aussi posemètre) vous propose des couples diaphragme/vitesse  possibles, selon si votre appareil est priorité à l’ouverture ou à la vitesse. Regardez l’image ci-dessous (manuel d’utilisation du Canon EF de 1973). Vous réglez l’iso à gauche (pellicule 100 iso sur la photo) puis vous vous placez en automatique sur l’objectif. Ainsi, le posemètre de l’appareil choisira le meilleur diaphragme quand vous lui direz quelle vitesse choisir.

Canon EF bague iso

Pour cette skieuse qui dévale la piste (photo ci-dessous), avec une pellicule de 100 iso, le photographe a imposé une vitesse de 1/1000 (la skieuse est en mouvement) et l’appareil a donc réglé le diaphragme à f/5.6. Vous observez ci-dessous ce que le photographe voit dans le viseur de son appareil, le couple : diaphragme/vitesse. couple diaphragme-vitesse

Autrement dit, une fois votre film chargé avec son iso fixe, pensez aux deux autres paramètres afin de prendre des photos avec des réglages d’ouverture et de vitesse adaptés à votre envie et votre environnement. Ainsi, on peut dire que le triangle 100 iso-f/5.6-1/1000 est juste la bonne quantité de lumière pour la photo ci-dessus. Le photographe aurait également pu choisir un diaphragme de f/22 et dans ce cas une vitesse plus lente que 1/1000 aurait été adéquate. Il existe des milliers de possibilités avec un film 100 iso et la quantité précise de lumière d’un objet à photographier. Pour mieux comprendre, voyons ici deux cas de figure qui montre que tout est une question d’équilibre entre les trois paramètres. On peut même oublier un peu la théorie qui consiste à dire que faible iso est synonyme de beaucoup de lumière.

Film 100 iso et peu de lumière

Si j’ai chargé mon appareil avec un film peu sensible comme par exemple un film 100 iso, je serais en théorie obligé de prendre des photos exclusivement dans des conditions très lumineuses pour avoir un joli rendu de photos. Certaines personnes aiment travailler sur des faibles iso car la qualité est bien supérieure. Je pense notamment aux photos de paysage. Dans le cas où je n’ai pas assez de lumière pour une pellicule 100 iso, mes photos risquent d’être trop sombres, sous-exposées. Une autre possibilité, si vous êtes malgré tout dans un environnement sombre, c’est donc de compenser par l’ouverture et la vitesse d’obturation. Captez un maximum de lumière! Ainsi, ouvrez votre diaphragme à son maximum : f/2 par exemple. Ou bien, laissez des temps de pose plus longs : 1/60, ou carrément 1/1. Néanmoins, en faisant cela, ayez en tête deux choses : 1) une grande ouverture sera synonyme de faible profondeur de champ et 2) un temps de pose long ne figera pas les objets qui bougent.

En bref, un film 100 iso ou moins : 

Excellente idée pour : des paysages de nuit. Gardez quand même un petit diaphragme (f/16) et utilisez un temps de pose très long : 8 secondes. Vous obtiendrez des images aux détails surprenants et d’une qualité exceptionnelle. Agrandissez vos photos format poster : ça sera toujours aussi top. Essayez la pellicule Kodak Ektar 100.

Très mauvaise idée pour : un concert, un feu d’artifices, une soirée entre amis. Il vous sera difficile de compenser avec la vitesse d’obturation (puisque vos sujets bougent) même avec une grande ouverture.

En numérique aussi bien-sûr vous pouvez fixer l’iso. Ainsi, c’est vous qui choisirez si vous voulez du grain ou pas et si vous privilégiez le grain de la photo à sa rapidité. Il suffit d’aller dans le menu de votre appareil et de passer de iso AUTO à la valeur d’iso que vous souhaitez. Photo ci-dessous : pellicule Kodak Portra iso 400, 1/125 et f/6. 

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Film 1600 iso et beaucoup de lumière

J’ai chargé mon appareil avec un film très sensible, or je me retrouve finalement dans des conditions plutôt lumineuses. Je pense notamment à une plage ensoleillée. Inévitablement avec un pellicule de grande sensibilité, vous aurez des photos avec du grain. La bonne nouvelle, c’est que selon les pellicules que vous avez choisi, vous obtiendrez certainement un grain intéressant (voir aussi l’article sur le bokhé). La première chose à faire forcément, c’est d’utiliser un diaphragme très petit : f/22. Vous obtiendrez une grande profondeur de champ. Ensuite, réglez votre vitesse sur 1/500 ou 1/1000, un temps de pose très court. Si malgré ça votre posemètre ou la cellule photographique de votre appareil estime que vous serez sur-exposé, pensez à changer d’objectif! En effet, nous avions vu, qu’en utilisant un téléobjectif par exemple, une quantité de lumière plus faible était perçu. C’est donc le moment ou jamais de faire des zooms de folie. Un bateau au loin? Un oiseau qui vole rapidement dans le ciel? C’est pour vous! Attention dans des environnements très lumineux, protégez toujours votre objectif (et vos yeux) par un pare-soleil qui se fixe sur l’objectif et évite les reflets sur les lentilles. Utilisez également des filtres UV pour un meilleur rendu des couleurs.

En bref, un film 1600 ou plus : 

Excellente idée pour : des zooms d’animaux dans la nature (safari photo). Petite ouverture, téléobjectif, et vitesse rapide pour ne rien perdre. Des ambiances avec faible luminosité mais des sujets qui bougent : concerts, feux d’artifices.

Très mauvaise idée pour : ballade en mer avec des reflets sur l’eau ou pire en montagne, photos surexposées garanties. Des photos de paysages pour obtenir des agrandissements à mettre dans votre salon. 

Photo ci-dessous : pellicule Ilford BW iso 1600, 1/250 et f/4.

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Compenser par l’iso pour faire des photos dans des conditions délicates

En photographie numérique, nous l’avons vu pour la vitesse d’obturation et l’ouverture, il était possible de fixer un paramètre et l’appareil se débrouillait avec le reste. On disait alors « priorité à la vitesse » ou « priorité à l’ouverture« . Dans certains cas un peu particuliers, vous vous rendrez compte que si vous laissez votre appareil tout faire en vous mettant en tout automatique (mode iAuto ou mode P) comme d’habitude, les photos seront loupées. En effet votre appareil se mettra toujours par défaut, dans des paramètres « modérés » en équilibre entre iso, diaphragme et vitesse. Par exemple : f/6, vitesse 1/60 et iso 400. Je pense notamment aux situations que nous avons vues plus haut : un concert, un feu d’artifices. Dans ce cas, je vous conseille d’utiliser carrément le mode M pour Manuel. Alors là, on passe à un cran au dessus… sans filets!

Le mode M est un mode où c’est VOUS qui choisissez la vitesse d’obturation ET l’ouverture. Il restera quand même une part de boulot à faire à l’appareil : régler l’iso.

Quelques exemples où le mode M est super utile :

  • Un concert ou une pièce de théâtre : vous souhaitez une vitesse rapide et en même temps une profondeur de champ intéressante.
  • Un feu d’artifices : de nouveau, rapidité du déclenchement et en même temps très peu de lumière
  • Un portrait au soleil avec une faible profondeur de champ : grande ouverture mais vitesse rapide. Iso faible.

Si vous ne vous sentez pas l’âme d’un aventurier, pas de panique, il existe là aussi des « modes » tout faits sur votre appareil photo numérique. Tourner la roulette mode SCENE et vous trouverez le mode : ski, feux d’artifices, etc… Il s’agit en fait des réglages pré-établis que nous venons de voir ensemble.

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Un posemètre, ce n’est pas tricher

Une super idée, c’est de se dénicher un posemètre. Où ça? Et bien par exemple en appli sur smartphone (gratuite).

posemètre

Il suffit ensuite de viser l’objet à photographier. Vous disposez de trois « roulettes ». Lorsque vous réglez l’iso par exemple, vous pouvez ensuite régler la vitesse ou l’ouverture et le dernier s’ajuste automatiquement.

posemètre capture d'écran

En photo numérique : le bruit

Alors que l’on parle de « grain » pour des pellicules argentiques, on parle plutôt de « bruit » en photo numérique. Ce sont ces pixels parasites qui apparaissent lorsque la lumière disparaît. Vous pourrez retrouver les explications sur ce qu’est le bruit, ses causes techniques ainsi que les moyens de le réduire dans cet article très bien fait de « la photo en faits ». En clair, à 3200 ISO, il faut quatre fois moins de lumière qu’à 800 ISO pour obtenir une photo correctement exposée. Cependant, augmenter la sensibilité diminue la qualité de l’image, dans des proportions variables selon les appareils numériques (les grands capteurs supportent mieux les hautes sensibilités). Un test comparatif mesuré sur une échelle iso, permet aux experts de quantifier la qualité de l’image à iso élévé. Par exemple, sur la photo ci-dessous, des composés électroniques ont été photographiés à différentes valeurs de sensibilité avec l’Olympus OM-D EM-5 par le site comparatif lesnumériques.com. On observe clairement qu’à 1600 iso, l’image est encore de bonne qualité, alors qu’à 3200 ça ne va plus. On peut donc en conclure que cette appareil photo donnera des photos moins nettes au-delà de 1600 iso.

ISO_OM-D EM-5

Conclusion

Allez un petit schéma du site astuces photos pour tout comprendre. Mais attention quand vous lisez « peu de lumière », il s’agit de la quantité que vous essayez de donner à votre surface sensible et non pas celle de votre environnement.

Triangle-expositionPetit plus …

merci à ce super article sur le blog de isomaton!

Les appareils photo argentiques récents se servent de ce qu’on appelle le « code DX » pour analyser la sensibilité de la pellicule et le nombres de prises de vues possibles. Ce code DX se présente sous la forme de douze cases laissées nues ou peintes sur les pellicules de négatif au format 135 (24×36) qui indiquent la sensibilité de l’émulsion, le nombre de vues et la latitude d’exposition. C’est grâce à ça que certains apapreil arrivent à reconnaitre automatiquement le type de pellicules que vous venez d’insérer. Chacune de ses douze cases donne un certain type d’information.

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Les cases 1 et 7 sont toujours nues et servent de contacts de référence, les cases 2 à 6 indiquent la sensibilité de la pellicule (ISO), les cases 8 à 10 indiquent le nombre de vues, les cases 11 et 12 donnent l’indice de luminance (ou latitude d’exposition). Donc, en grattant, peignant, triturant ces petites cases, vous devriez sans grande difficulté réussir à modifier faussement l’ISO de votre pellicule (en cliquant sur ce lien).

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